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Comité de lecture Prix Esther

Un premier comité de lecture pour une expérimentation nationale

Le Prix Esther, décerné par des jeunes pour des textes de théâtre contemporain, est une expérimentation pédagogique de type « comité de lecture » de l’Espace Cesame – Espace Dynamique d’Insertion – à Cergy-Pontoise. Le Prix Esther est une action culturelle pour l’accès à la pratique de la langue française. C’est un projet soutenu par la délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) du ministère de la Culture, dans le cadre de leur appel à projets national « action culturelle et langue française ».

« Langue maternelle pour les uns, langue du pays d’accueil pour d’autres, la langue française permet la communication entre tous, sa maîtrise étant une composante essentielle du vivre ensemble. »

Si notre cadre constitutionnel et légal en vertu duquel « La langue de la République est le français » illustre le rôle clé de notre langue dans le sentiment d’appartenance à la République, les fortes inégalités dans la pratique et la maîtrise du français constituent un obstacle de taille à l’adhésion à ce modèle.

Lutter contre l’insécurité linguistique

Il est donc nécessaire, dans une perspective de réduction des inégalités face à la langue française, d’en faciliter l’accès pour toutes les personnes chez qui les mécanismes de relégation comme de non participation à la vie sociale produisent une insécurité linguistique, qui est souvent culturelle. Qu’il s’agisse de développer les compétences à l’écrit ou à l’oral, de personnes scolarisées en France ou de permettre à des migrants allophones de communiquer en français, à l’oral et à l’écrit, les pratiques culturelles et artistiques, de même que le contact avec les œuvres et les documents originaux constituent un levier d’action efficace pour l’appropriation du français. En retour, celle-ci peut favoriser l’accès à l’offre culturelle.

Pour cela, des formes particulières de médiation doivent être mises en place avec le concours des réseaux et des opérateurs de la culture, comme de l’insertion, de la formation, de la justice, du champ social et socio-éducatif. Leur sensibilisation, et leur formation, au moyen de méthodes et d’outils pertinents apparaît ici comme nécessaire à la mise en place de dispositifs de démocratie culturelle adaptés aux caractéristiques de personnes en difficulté avec le français.

Lancé en juin 2015 conformément aux mesures prises par le Comité interministériel à l’égalité et la citoyenneté (CIEC) du 6 mars 2015, l’appel à projets national a recueilli plus de 700 propositions de projet et permis de soutenir 146 projets (17 projets d’outillage, 129 projets locaux). Doté d’un million d’euros, il a mobilisé un budget global de 2,6 millions d’euros grâce, notamment, à l’apport des collectivités territoriales et des partenaires privés. Les réalisations sont consultables sur le site du ministère de la Culture et de la Communication.

Une pratique à transmettre

En comité de lecture, passionnées de théâtre et de débats, nous avons développé une pratique à transmettre. Rencontrer des artistes c’est entrer dans l’univers de la subjectivité, d’une audace, d’un parti pris. A l’exemple d’Esther, les jeunes engagés ici ne se sentent pas « légitimes » pour s’exprimer dans le débat public. L’artiste vise l’universel : peu lui importe le niveau de langue, de diplôme de son lecteur, de son spectateur. Il s’adresse avant tout à notre sensibilité. Traversé par le même fil d’actualité, l’auteur vivant respire le même air que nous et il propose un point de vue sur notre société. Il a besoin du retour de chacun: est-ce que son personnage est touchant? Est-ce que son écriture fait résonner l’émotion du lecteur ? Les jeunes ont réellement quelque chose à apporter à l’artiste, toujours en demande.

Le comité de lecture est nécessaire

Le comité de lecture, comme l’atelier d’écriture, sont nécessaires, dans un but de réduction des inégalités face à la langue française, d’en faciliter l’accès pour toutes les personnes chez qui les mécanismes de relégation  sociale produisent une insécurité linguistique, qui est souvent culturelle. Lire la suite >

« J’aime pas lire », « Je ne lis jamais », « Moi et la lecture ça fait deux. » Il n’est pas rare d’entendre ces phrases dans la bouche des jeunes que nous accompagnons. Pour beaucoup, la lecture est apparentée à un devoir, un exercice solitaire, ennuyeux, imposé : tout le contraire d’un plaisir. Pourtant, à chaque fois que nous convions les jeunes à lire à voix haute des textes issus du répertoire classique, des poèmes, des romans, ils y prennent très vite plaisir et s’enhardissent.

Esther et le comité de lecture

Esther est une jeune fille très douce, souriante, qui éprouve de la difficulté à s’exprimer en public. Mais quand elle arrive dans le projet « Paroles d’Honneur », elle veut monter sur scène. Elle bute sur chaque mot, effrayée comme s’ils allaient sauter de la feuille pour la saisir à la gorge. On lui donne très peu de texte pour le théâtre. Et elle apprend. Elle progresse. Lors du festival d’Avignon, elle ne perd pas une miette de tout ce qu’on lui propose, danse le soir, se lève le matin toujours souriante, toujours ouverte à la rencontre. A la rentrée 2016, elle s’inscrit au groupe de lecture et lit. Apprivoise les mots, apprend à ne plus en avoir peur, lit à voix haute, de mieux en mieux, joue au théâtre. Elle est tellement fière qu’elle se promène, partout, avec son livre à la main, comme un étendard pour afficher au monde sa nouvelle identité de lectrice. Le parcours entre la peur du livre et son appropriation s’est fait en douceur, en plaisir, en petites victoires et en commun.

Le comité de lecture de l’Espace Cesame et le site du Prix Esther bénéficient du concours de l’ Association Incite.